Galerie L'Aberrante

VERSUS // ECOLOGIE ET COEXISTENCE

Les calanques

CÉLINE CLANET, ARIANNA SANESI, MÉLANIE PATRIS, HÉLÈNE DAVID

Une proposition de la Galerie L’Aberrante et Corpo Opaco, en collaboration avec Fonderia 20.9 et L’Image à venir.

16 artistes :

Galerie L’Aberrante

Céline Clanet, Arianna Sanesi, Mélanie Patris, Hélène David

Fonderia20.9

Louis Perreault, Jan Stradtmann, Massimo Mastrorillo, Elena Aya Bund

L’Image à Venir

Sebastián López Brach, Yvette Monahan, Marine Lanier, Marc Wendelski

Corpo Opaco

 Sofía López Maňán, Léa Habourdin, Coline Jourdan, Marina Caneve

Une  projection autour des thèmes de l’écologie et de la coexistence

Mars 2020, nous vivons notre premier confinement, fermeture des galeries, arrêt de l’activité culturelle, une exposition qui tourne court… L’idée de Versus apparait alors, trouver le moyen de poursuivre la diffusion de l’art

“Ecologie et coexistence sont les questions au cœur de Versus, un projet collaboratif réunissant seize photographes engagés dans des réflexions interconnectées sur l’écologie, la fragilité des écosystèmes, la présence humaine dans le paysage naturel. Chaque organisateur a fait une sélection de quatre artistes qui explorent, à travers un langage photographique vaste et hétérogène, le thème essentiel de notre relation avec le monde dans lequel nous vivons et auquel nous appartenons.

Le mot Versus nous a offert des repères importants pour commencer à approfondir le large et complexe sujet de la pensée écologique, en lien avec son sens étymologique et ses significations multiples. Interprété comme un clash, un conflit, « versus » rappelle les oppositions binaires esprit / corps, culture / nature, humain / animal qui depuis longtemps définissent le relations avec notre environnement.

Pensé plutôt dans son sens latin d’origine, comme un adverbe indiquant le mouvement, « versus » suggère un changement de direction, la possibilité de surmonter une fracture qui semble irréparable. Si le rapport à notre environnement a souvent été abordé comme une appropriation, une occupation ou une exploitation, nous amenant à la crise écologique actuelle, peut-être pouvons nous aussi envisager des formes de cohabitation respectueuse avec l’incroyable pluralité de tout ce qui n’est pas humain et irrévocablement enchevêtré avec l’humain. Penser à l’écologie commence donc vraiment par la prise de conscience que nous faisons tous partie d’un vaste «maillage», comme l’a défini Timothy Morton, qu’être implique toujours un être-avec et exister signifie toujours coexister.

Photographier nous permets de passer du temps à observer de près ce qui nous entoure, à découvrir et à méditer sur les histoires que nous avons choisi de raconter; en prenant des images, nous nous connectons au monde que nous photographions, nous nous impliquons dans un processus de co-réponse.”

Rachele Ceccarelli, Corpo Opaco

La Galerie L’Aberrante a le plaisir de présenter “Les Chapieux, Géographie d’un secret” de Céline Clanet, “Dispersal” d’ Arianna Sanesi, “Melanos” de Mélanie Patris et “Noces ou les confins sauvages” d’Hélène david

Les Chapieux, Géographie d’un secret

“ Les Chapieux sont, sur l’abrupte face méridionale du mont Blanc, un site de haute altitude inaccessible en hiver en raison des dangers d’avalanche. 

Mandatée par la Fondation Facim, la photographe Céline Clanet a suivi vers ces altitudes tous ceux qu’appelle le lieu : les paysans et leurs bêtes  ; les chasseurs qui traquent les gibiers de montagne  ; les grimpeurs et les skieurs en quête de l’espace éblouissant des sommets. À travers images et textes s’ébauche le portrait d’un de ces lieux que leur isolement et leur beauté intraitable placent au premier rang des fantasmagories humaines” 

(Extrait de l’introduction de la monographie parue chez Actes Sud)

Noces ou les confins sauvages 

Noces ou les confins sauvages est un récit contemporain aux frontières du réel et du merveilleux. 

Une traversée du littoral méditerranéen, comme un prolongement de l’intime et du familier, mais aussi un lieu de surgissement possible pour le fantastique et les mythologies.  Une exploration du littoral des calanques, perçu comme espace de dialogue entre la mer, les bêtes et les êtres humains.

C’est l’histoire d’un devenir commun, enchanté et vulnérable. Les corps se déploient au contact des éléments, entrent en relation avec le vivant non humain, consentent à devenir perméables au sauvage.  

Dispersal

C’est un jour brumeux et nous marchons déjà depuis quelques heures. Il pleut depuis des semaines maintenant [ ..] Le temps pour les loups, on disait en Italie. On se trompe tellement. Les loups n’aiment pas la pluie.

Mon ami et guide vérifie sans cesse le signal GPS, pour me conduire là où le collier du loup a envoyé le même signal il y a un an. Nous voyons ce que le loup a vu, je n’arrête pas d’y penser.

Quelque chose de blanc parmi les feuilles: un os long et épais. Propre, totalement propre. J’ai lu que les loups dorment près de leurs proies chassées jusqu’à ce qu’il ne reste plus rien. J’éprouve une grande  joie: nous sommes sur la bonne voie.

“N’as-tu pas peur? Un prédateur est proche de nous, en ce moment même, peut-être.” demande mon ami. Non, je n’ai pas peur.

Être simplement autorisé à entrer dans leur royaume et pouvoir voir et dire ce qu’ils voient, c’est déjà un grand honneur.

J’ai utilisé les données sur Sic, un loup italien en dispersion*, pour tracer une piste à suivre, j’ai voulu rencontrer toutes les personnes qui l’ont rencontré. Je voulais voir ce que le loup avait vu.

Dispersal a commencé comme un projet sur les loups et l’est toujours, mais c’est plus un projet sur le désir pour eux et pour ce qu’ils peuvent représenter. Les loups, une espèce toujours en danger, sont toujours un symbole puissant du mystère, de la liberté et de l’indépendance de la nature par rapport à la volonté de l’humanité.

Après 8 mois de suivi GPS, Sic a disparu, et son collier a été retrouvé non verrouillé dans les bois italiens. Sic reste un mystère et un symbole.

Arianna Sanesi

Melanos

La crise environnementale et humaine dans laquelle nous nous trouvons m’amène à questionner les fondements des imaginaires qui nous traversent, ce qui fait nos identités et ce qui définit notre rapport au monde. Depuis plusieurs décennies, l’Homme s’est arrogé le droit de dominer la nature. Détruisant les forêts, polluant les rivières et les océans, poussant à l’extinction d’une quantité innombrable d’animaux et de végétaux. Il a aussi réduit au silence bon nombre de peuples autochtones et discriminé tout autant de minorités. Le dualisme entre la nature et la culture dont la société contemporaine est em-preinte oriente sans conteste le rapport à la vie des individus. Séparant ainsi le corps de sa nature profonde, des cycles et des flux naturels qui l’habite, repous-sant les parts de « sauvage » aux confins de la psyché et réduisant au silence les savoirs instinctuels qui sont les nôtres. Comment retrouver ces parts de sauvage en soi ? Comment se relier à l’être intuitif qui nous habite ? Comment réunifier le monde naturel et la vie intérieure ? Pour les écopsychologues, l’être humain est une identité élargie qui inclut les autres espèces et son environnement. Dans cette approche, les êtres humains, les animaux, les plantes et la terre sont vus non plus comme des objets mais bien des sujets interagissants. Partant de cet à-priori, du sentiment d’incomplétude et de confinement de mon être, j’ai eu besoin de réinventer mon territoire intérieur, de retrouver les racines de mon être, de me réapproprier les espaces qui offrent de la liberté à mon rapport au monde. 

Utilisant la photographie comme miroir et comme support de projection, je me suis glissée dans des paysages sauvages ou domestiqués, que j’ai toujours désirés. Les faisant miens et reconstituant image après image mon identité instinctive, me libérant ainsi des carcans et des imaginaires de la société. 

M.Patris 

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